Linda Wilson : Fondatrice d’une coopérative axée sur la communauté LGBTQ+
Publié le 15 juin, 2022
Bien que de nombreuses personnes aient vu le drapeau arc-en-ciel flotter fièrement devant la coopérative Abiwin dans le centre-ville d’Ottawa, la plupart ignorent que cette coopérative a été fondée précisément pour répondre aux besoins de logement des membres de la communauté 2SLGBTQ+ d’Ottawa.
À l’occasion du mois de la Fierté, nous nous sommes entretenus avec Linda Wilson, l’une des membres fondateurs de la coopérative Abiwin, pour découvrir comment la coopérative a vu le jour.
« Toute ma vie a changé »
Linda est sortie du placard en 1981 : « Mon mari de l’époque et moi avons pris la décision qu’il valait mieux ne pas vivre dans le mensonge, » se souvient-elle. Elle décrit les répercussions de son déménagement de la banlieue au centre-ville d’Ottawa.
« Je me suis impliquée auprès de Gais de l’Outaouais, et toute ma vie a changé. J’ai rencontré de nouvelles personnes et j’ai beaucoup appris. »
Linda décrit Gais de l’Outaouais comme « un groupe de femmes et d’hommes féministes conscients de la diversité au sein de la communauté gaie ». L’organisation proposait diverses activités communautaires, y compris une ligne téléphonique pour les personnes homosexuelles, un bureau de conférenciers, des groupes de soutien, des danses, des réunions communautaires et des comités d’action politique qui abordaient plusieurs questions, comme l’inclusion de l’orientation sexuelle dans la Charte canadienne des droits et libertés.
Par la suite, Linda est devenue la première femme présidente de Gais de l’Outaouais, renforçant ainsi son engagement envers l’équité entre les genres au sein du mouvement de défense des droits des homosexuels.
J’étais tellement pleine d’entrain. Chaque soir, j’avais une réunion quelque part.
Développer des logements sûrs pour les membres de la communauté LGBTQ+
Un enjeu dont il était souvent question à Gais de l’Outaouais concernait le besoin de logements sûrs et accueillants pour les Ottaviens de la communauté 2SLGBTQ+.
En 1983, un sous-comité sur le logement a vu le jour et contribuerait éventuellement à la fondation d’Abiwin.
Linda décrit la plupart des logements coopératifs offerts à l’époque comme « très axés sur les familles traditionnelles, ce qui ne correspondait pas aux besoins d’une grande partie de la communauté queer ». Les fondateurs d’Abiwin ont plutôt veillé à ce que la coopérative propose une variété de logements de tailles différentes, ainsi que des maisons accessibles, afin que ses membres soient représentatifs de la communauté au sens large.
« Pour créer un espace pour les rassemblements communautaires, nous avons conçu la coopérative pour y inclure un grand patio à l’arrière où nous pouvions organiser des barbecues, des événements, des rencontres, des repas-partage… Nous y apprenions à connaître nos voisins, ce n’était pas comme un immeuble anonyme. Il y avait vraiment un sentiment de communauté. »
Le futur emplacement d’Abiwin appartenait à Co-operators, qui l’a vendu au groupe à un bon prix. Avec l’aide de Peter Trotcha de la Fédération des coopératives d’habitation d’Ottawa (qui porte maintenant le nom Association de l’habitation coopérative de l’Est ontarien), les membres du groupe se sont mis au travail.
Ils ont d’abord rénové une rangée de maisons patrimoniales qui se trouvaient sur la propriété. Linda et sa conjointe ont emménagé après cette première phase et étaient présentes lorsque la coopérative a ajouté des habitations intercalaires entre les maisons existantes, puis a démoli un immeuble d’appartements à quatre étages pour le remplacer par un immeuble plus élevé. Elles ont même agi comme patrouilles de sécurité bénévoles lors de la construction, se promenant sur le site chaque nuit avec des lampes de poche.
« Ils faisaient simplement partie de notre communauté » : entraide lors de la crise du SIDA
C’est vers 1982 ou 1983 que des personnes que Linda connaissait à Ottawa ont commencé à souffrir du SIDA.
À Abiwin, il n’y a eu aucune discussion sur la manière de traiter les membres actuels ou potentiels qui étaient séropositifs : il était tenu pour acquis qu’ils faisaient partie de la communauté et qu’ils seraient accueillis et soignés.
En 1986, l’un des voisins de Linda a contracté le SIDA. Avec d’autres membres de la coopérative, Linda et sa conjointe l’ont aidé autant qu’elles le pouvaient. Elles ont rencontré ses parents, qui vivaient à l’extérieur de la ville, et leur ont donné leur numéro de téléphone afin qu’ils puissent garder le contact pour prendre de ses nouvelles.
Linda décrit cela comme un résultat naturel de la vie dans une communauté aussi soudée. Elle se souvient d’avoir également aidé un autre voisin de la coopérative, qui était quadriplégique, en lui prodiguant des soins personnels un soir sur deux pendant huit mois alors qu’elle vivait là.
« Si je n’avais pas fait partie d’une coopérative, je ne pense pas qu’un de mes voisins aurait pu me demander de l’aide. »
Rétrospective et regard vers l’avenir
Linda et sa conjointe ont vécu à Abiwin depuis son ouverture en 1985, jusqu’en 1990, lorsqu’elles ont acheté la maison où elles habitent encore aujourd’hui.
Au cours des 35 années qui ont suivi la fondation d’Abiwin, Linda a été témoin de nombreux changements dans la communauté 2SLGBTQ+ à Ottawa et ailleurs. Elle a assisté au premier Défilé de la fierté d’Ottawa, en 1986, et participé à sa croissance au fil des ans.
Linda et sa conjointe, qui travaillaient toutes deux pour le gouvernement fédéral, ont poursuivi le gouvernement fédéral, avec le soutien de leur syndicat, pour qu’il accorde des prestations de retraite aux couples de même sexe travaillant comme employés fédéraux. En mai 1996, lorsque le Parlement a voté pour l’inclusion de l’orientation sexuelle aux motifs de discrimination interdits par la Charte des droits et libertés, Linda et sa conjointe ont pu y assister depuis la tribune de la Chambre des communes, sachant que cela mènerait à la résolution de leur poursuite.
En repensant aux années 1980, Linda témoigne :
« Je suis heureuse de m’être impliquée dans Abiwin au moment où je l’ai fait. J’étais tellement pleine d’entrain. Chaque soir, j’avais une réunion quelque part : j’ai fait partie du conseil d’administration fondateur de Pink Triangle Services [maintenant Kind Space] et d’Abiwin et j’ai fait du bénévolat pour la ligne téléphonique pour les personnes homosexuelles et le bureau de conférenciers [de Gais de l’Outaouais]. Cela a fait une différence pour moi : ça a donné un sens à ma vie. En fin de compte, je suis une bénéficiaire. »
Bien que la vie soit devenue plus facile à bien des égards pour les membres de la communauté 2SLGBTQ+ à Ottawa depuis les années 1980, Linda « [sait] qu’il y a encore beaucoup d’homophobie et que les membres de la communauté queer sont encore victimes de discrimination ». Elle souligne en particulier les luttes des communautés transgenres. « Il en va de même pour les personnes appartenant à de nombreux autres groupes; nous devons être des alliés les uns pour les autres. »
Grâce au travail de membres fondateurs comme Linda Wilson, la coopérative Abiwin continue d’offrir des logements sûrs, accueillants et abordables à un ensemble diversifié de membres, dans ce même esprit de soutien et d’entraide.
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